vendredi, juin 28, 2019

La délivrance, perle oubliée



22.05.17 - Jean-Marc Bigler a prié pour la libération de centaines de personnes, croyantes ou non. A quatre-vingts ans passés, il voyage toujours pour enseigner.

Il a récemment publié «La délivrance, perle oubliée» (Ed. Sotéria). Entretien. 

L'agriculteur de Martherenges (Suisse), responsable de l’association Soteria, évoque sa foi et son ministère

Comment avez-vous découvert le ministère d’exorcisme et votre vocation?

Je participais à une convention à Vichy, en 1975. J’avais quarante et un ans. J’ai partagé mes problèmes, mes angoisses. Je pensais que ça faisait partie de la vie. On m’a dit que j’avais besoin de délivrance. Or, on m’avait enseigné qu’un chrétien ne pouvait avoir de mauvais esprits. Quand on a prié pour moi, j’ai vécu une délivrance spectaculaire.

Cela a suscité une forte interrogation: si moi qui ai été élevé «entre deux pages de Bible» en avais besoin, qu’en était-il des autres? J’ai entendu mon appel à ce moment-là. Je n’avais pas fait d’études ni d’école biblique. J’ai été à l’école du Saint-Esprit. Il y avait cette pensée forte: Dieu ne m’appelait pas en fonction de ce que je pouvais faire, mais de ce que lui voulait faire.

Comment votre ministère a-t-il été reçu dans ses débuts?

Très bien, par les brebis guéries et transformées. J’ai été impressionné de voir rapidement des demandes affluer. Les gens voyaient le fruit de la prière et passaient le mot. Pendant dix, quinze ans, c’est un travail que Dieu a tenu caché. On vivait les choses chez nous. Mais la demande grandissait. Les visites étaient quotidiennes ou presque. On a commencé des rencontres collectives.

Comment avez-vous géré l’opposition ou l’incompréhension quand elle se manifestait?

En devenant vieux, c’est comme le vin rouge, on devrait s’améliorer. Je me décharge sur Dieu. Je me dis que ce n’est plus mon affaire. Un moment, j’ai cru devoir assumer en répondant, mais plus maintenant. Il y a tellement de demandes! Je suis heureux dans ce que je fais.

Qu’avez-vous appris sur Dieu au travers de ce ministère?


Certains minimisent leurs problèmes ou leurs liens. Mais pas Dieu. Pour lui, rien n’est insignifiant. Il aime guérir, c’est son caractère. J’ai aussi appris qu’il est plus facile de prier pour un médium qui veut se tourner vers Dieu que pour un chrétien légaliste pris dans son système. Ce qui est émotionnel, qui touche à l’identité, prend plus de temps et il y a là tout un travail pour les Eglises: les gens sont très blessés. Ils ont besoin d’être aimés.

Qui a joué un rôle particulier dans votre chemin de foi?


Incontestablement, mon père. J’ai le privilège d’avoir eu un père avec lequel ce qu’il a dit était en adéquation avec ce qu’il a vécu. Il m’a enseigné à aimer Dieu et à croire en la Bible. Il était légaliste, mais je n’ai pas eu les épines du légalisme. J’ai vu les fruits de ce que ce père disait. Il m’a bien cadré, mais l’amour régnait. Je me suis du reste converti à l’âge de treize ans.

La délivrance a été une part importante du ministère terrestre de Jésus. Or les Églises même évangéliques peuvent se montrer frileuses à l’offrir. Pourquoi?

Il y a plusieurs raisons. 

La première, c’est l’enseignement généralisé qu’un chrétien ne peut pas avoir de mauvais esprits. On dit que l’Esprit Saint n’est pas à l’aise avec les mauvais esprits. Mais avec Alzheimer, la pornographie, l’adultère, il l’est? Si les mauvais esprits sont dehors, on peut leur résister. S’ils sont dedans, on a besoin d’en être libéré. Ce n’est pas «grave» d’avoir un mauvais esprit, mais celui-ci doit partir car on a autorité sur lui.

Deuxième raison, la peur de toucher au monde des ténèbres, car les mauvais esprits peuvent se faire menaçants. Il y a peut-être aussi un manque d’autorité chez les chrétiens. Et puis, au niveau du temps et des combats, le prix est élevé quand on a un ministère dans le domaine.

Vous écrivez que la délivrance fait partie de l’hygiène spirituelle du chrétien.

Jésus la pratiquait tous les jours et il a envoyé ses disciples le faire à leur tour. Quelqu’un qui se bat avec l’angoisse, les peurs, les cauchemars, l’attrait du jeu, de l’argent ou de la pornographie est culpabilisé, donc freiné dans sa marche avec Dieu. Après avoir vécu une délivrance, la culpabilité est finie! Le but de la délivrance est de servir Dieu.

C’est vrai, la démarche de solliciter la prière de délivrance est un pas d’humilité, car il s’agit de se confesser à un autre chrétien.
Dans votre livre, vous parlez des «portes spirituelles» qui laissent entrer les mauvais esprits.

Il y a nos propres péchés et ceux hérités de nos pères, l’occultisme et les chocs émotionnels.

La Croix a deux axes. Si je trompe ma femme, je demande pardon à Dieu et il me pardonne (axe vertical). Mais l’Ennemi se moque que je sois pardonné. Donc ma démarche est d’aller trouver un frère chrétien (axe horizontal) afin qu’il chasse l’esprit impur qui m’a poussé à commettre l’adultère. On traite souvent la ronce, mais pas la racine. C’est pour cela que les gens rechutent!

Autre porte spirituelle, les chocs émotionnels. Récemment, j’ai prié pour une femme angoissée par la mort: elle avait vu le cadavre de son grand-père et cela lui a fait un choc. La peur est une porte ouverte, si elle n’est pas gérée.

Vous consacrez un chapitre à la colère. Pourquoi?

Je suis confronté à cette situation dans mes entretiens et je l’ai vécue moi-même. La colère peut être très violente et mener des couples à la séparation.

Deux termes grecs différents sont utilisés pour la colère dans Eph. 4, 26-27. La première est une colère passagère, que nous n’entretenons pas et gérons avant le coucher du soleil. La deuxième est manipulatrice et engendre la peur chez les victimes. C’est la manifestation d’un esprit de colère qui non seulement blesse et détruit, mais place les autres sous un fardeau de condamnation, ce que Dieu ne fait jamais.

Selon votre expérience, qu’est-ce qui bloque le processus de délivrance?


Le non-pardon. Mais bien sûr, il s’agit d’avoir de la sensibilité. Quand une personne a vécu quelque chose de terrible, comme un abus, on ne peut pas lui demander de pardonner directement mais l’amener à choisir de verbaliser: «Dieu, si tu m’aides, je pourrai le faire». La plaie n’est pas refermée, mais l’épée n’est plus dedans pour la faire souffrir.

L’incrédulité, les enseignements opposés au baptême du Saint-Esprit peuvent aussi bloquer.

A vos yeux, le sujet de la délivrance est-il assez prêché dans les Églises?

Peu d’Églises l’enseignent. Selon moi, Dieu désire donner un ministère de délivrance à chaque communauté.

C’est ce qui se passe au Mexique. Les personnes se formant dans ce domaine sont de plus en plus nombreuses. Ils se préparent avec des enseignements pastoraux sur le pardon, la sainteté et jeûnent avant mon arrivée. Ensuite, ils témoignent devant la communauté, même des pasteurs. Pour eux, il n’y a pas de honte, ils ont compris que c’est le seul moyen de vivre ce que Dieu désire pour ses enfants.

La délivrance, c’est ce que Jésus enseigne avant la guérison. Je vois souvent des gens guéris instantanément quand les démons partent.

L’Évangile est tellement simple, on le complique.

Une délivrance peut s’accompagner de manifestations physiques, parfois impressionnantes...

Les exemples racontés dans les Évangiles sont loin d’être paisibles. Mais c’est glorieux! Plaise à Dieu que des manifestations physiques se produisent dans chaque Église pour que les croyants ouvrent les yeux sur la souffrance des gens!

Il faut croire à la délivrance pour que les mauvais esprits soient chassés.

Propos recueillis par Sandrine Roulet

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